Performances, débats et lectures autour d’Alice Rivaz, organisées par l’Institut d’étude des intervalles dans le cadre du projet « Le Tiret (2021-2031) »

Avec Delphine Gardey, Valérie Cossy, la compagnie K&A, Ramaya Tegegne, Daniel de Roulet, Caroline de Cornière

Alice Rivaz intègre en 1925 le récent Bureau International du Travail, où elle travaillera jusqu’à sa retraite comme sténodactylographe puis documentaliste. Dans une société encore très conservatrice, cette institution moderne et cosmopolite lui fournit un poste d’observation unique sur les mutations organisationnelles et sociales de son époque. Alors que Rivaz et ses consœurs se trouvent vouées « aux tâches abstraites qu’exige l’administration des choses », portant sur leurs épaules le poids d’une modernité placée sous le signe de l’accélération et du rendement, la romancière se servira bientôt du même outil – la machine à écrire – pour affirmer sa propre voix et témoigner de son expérience. Dans ses romans Comme le sable (1946) et Le Creux de la vague (1967), elle décrit avec une finesse remarquable ces nouveaux environnements de travail et de vie, au sein de ce qu’elle nomme alors « le peuple des alvéoles ». Elle y questionne aussi bien la crise de sens produite par cette révolution administrative, que la reconfiguration des rapports de domination genrés qui l’accompagnent.

Près de 80 ans plus tard, ces questions restent largement d’actualité. Elles prennent toutefois des formes nouvelles, alors que le travail subalterne qui sous-tend l’administration des choses se trouve parfois délégué aux machines, parfois délocalisé, souvent invisibilisé. Pour remonter aux sources de cette histoire et en aborder les enjeux, l’historienne et sociologue Delphine Gardey, spécialiste de l’histoire des employé-e-x-s de bureaux sera en conversation avec Valérie Cossy, professeure en études genre et autrice de l’ouvrage Alice Rivaz. Devenir romancière (éd. Suzanne Hurter, 2015). La Cie K&A (Karla Isidorou et Alexandra Bellon) proposera une performance musicale participative avec machines à écrire, accompagnée de lectures de la danseuse et chorégraphe Caroline de Cornière. La performance inclura un modèle de la fameuse Olivetti Lettera 32 qu’Alice Rivaz a elle-même utilisée, transformée en instrument de musique par Théo Soulie. L’artiste Ramaya Tegegne questionnera les enjeux de la charge administrative chez les artistes – entre asservissement et émancipation. Enfin, la première édition d’Insert, conçue par l’écrivain Daniel de Roulet en complément de son livre La Suisse de travers (éd. Héros-Limite, 2020) sera inaugurée lors de cet événement.

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Photo: La Dactylographe, Léon Perrin. Photo Laura Cazador / Cécile + Roger